15/03/2013

L'écorcheur de Lune ~ Prologue

~ Val l'Ancienne ~


La Guerre du Chaos -aussi appelé Grande Guerre, Terreur Divine, ou Impensable Foutoir- est un événement ayant eu lieu environ un siècle avant l'établissement du calendrier affraral, quelque part pendant période Sahnkrym du calendrier hrugrak, et servant de point de départ à l'ère du Renouveau du cycle Impérial. Il ne reste que très peu de textes antérieurs à cette période, et les rares écrits font états de plusieurs races qui n'existent plus, et dont il ne reste que des vestiges épars : les plateaux Sauloré, les cités d'Ay, les antiques cryptes Azuréennes, le grand temple E'radip... L'on a que très peu d'informations sur cette guerre, mais elle ravagea tout le monde connu, et certains textes Affraraly prétendent que les Dieux eux-mêmes prirent physiquement part au conflit, et que certains moururent lors du conflit ; la Tombe d'Argaräk devrait son nom à une divinité déchu, tout comme son climat.
Les connaissances antérieures furent donc perdu, hormis un librarium Affraral à moitié incendié, une grande partie de la collection impériale, ainsi qu'un grand nombre de rouleau E'radip ; ces derniers sont néanmoins totalement illisible, leur écriture atypique n'a jamais été appris par une autre race, et ayant été tous exterminé, personne n'est en mesure de comprendre leur langue. Les Hrugrak, fortement impliqué dans le conflit, aurait pu donner des récits très détaillés des événements, mais les incessantes guerres intestines n'aidèrent pas la transmission du savoir, qui chez eux est exclusivement orale.
Toutes les races furent impliqués dans la guerre, dont on ignore précisément les causes, et les répercussions furent bien entendu importantes : les E'aradips, Ay, Saulorites, furent exterminés, les humains virent leur terre natale devenir inhabitable, et les Affraraly ainsi que les Hrugrak virent leur population décimée. On ignore si des peuples plus marginaux, tel que les Micéléens, les Mariauls et les R'razrag'ak, prirent part au conflit ou non, et les éventuels conséquences que cela aurait eu.
L'apparition des Erashas marqua la fin de la guerre, cette nouvelle race émergeant avec à sa tête Yggdrasil et les Neufs, qui conjurèrent les Dieux et mirent fin à tout les conflits ; cette dernière partie étant relaté plus en détail dans les légendes d'Yggdrasil l'Arbre-Monde.
Après la guerre s'ensuivit une période obscure, où se succédèrent famines, épidémies, et errances, le temps que se reconstruise la société. Les Affraraly retrouvèrent leur forêt natale dévastée par des incendies, les humains durent s'exiler de ce qui devint la tombe d'Argaräk, et les Hrugrak mirent des décennies à construire des navires satisfaisant pour les ramener sur leur archipel lointain. Les Erashas quant à eux, s'éparpillèrent à travers le monde, pour veiller à ce qu'aucun autre conflit n'éclate ; Yggdrasil s'installa dans un territoire inoccupé, au pied des montagnes du nord, et continua à surveiller le monde, tandis que l'une des Neufs, Val, administrait la ville naissante.


Extrait de "La grande Histoire du Monde"
Année 404, auteur inconnu
Traduit de l'affraral par Gog'eul


~ ¤ ~


La grande cité du Nord, Val l'Ancienne, fier fief du peuple Erasha, se dressait devant mes yeux. Perdu dans la verdoyante nature, au pied des immenses pics de l’Épine Dorsale, elle affichait ses rues pavés de pierres blanches de part et d'autre du fleuve Drashym les maisons étaient de pierres beiges et de tuiles rouge, un peu partout une végétation abondante faisait vivre la ville de mille couleurs durant les saisons chaudes. Et tout autour de ce charmant endroit, sur des jours e des jours de marches alentours, il n'y avait que des prairies, des bois, des étangs, et quelques fermes de pierres grises qui cultivaient au gré des saisons les fruits de la terre pour subsister. Tout transpirait la tranquillité, et la paix... autant dire que je n'y resterais pas longtemps.
Mes pas résonnaient dans le crépuscule, produits par des bottes de marches en cuir, peu discrètes mais très confortables, et si mes vêtements étaient assez passe-partout, simple ensemble pantalon et chemise -néanmoins tissé avec de la laine provenant de béliers paissant sur les hauteurs E'radip- avec passé par-dessus une veste longue, en cuir Mariaul d'après le vendeur, ainsi qu'un sac en bandoulière fait de toile imperméabilisé ; si tout cela donc m'assurait une certaine discrétion, une allure de voyageur comme il y en a tant d'autres, ma chevelure d'un roux flamboyant et mes yeux dorés sont nettement moins oubliable...
De plus, j'appartiens à la race des Erashas, et si nous autres avons une apparence plus ou moins semblable aux humains, des caractéristiques animales viennent nous en différencier, et dans mon cas, mes oreilles sont celles d'un renard, et le bas de mon dos se prolonge en une élégante queue recouverte de fourrure tout aussi voyante.
J'observais, en silence, les commerçants débarrasser les étals qu'ils avaient installés sur la rue principale, et progressait tranquillement. Quelques personnes me saluèrent, et je leur rendis avec grand plaisir ; j'étais chez moi ici, dans la plus grande cité de mon peuple, et je m'y sentais à l'aise. Néanmoins, chaque fois que je regardais l'une de ces personnes, mes semblables, je voyais leur vie, le quotidien, ces journées répétés, ponctués de petits riens. J'admirais cette force, ce bonheur que pouvait apporter une vie bien remplie.
Une femme accueillie sur le perron son mari en l'étreignant, et cela fit naître en moins une pointe de regret ; hélas, je n'étais pas fait pour une telle vie, mon cœur rêvait de voyage, d'aventures, de voir du monde... depuis une quinzaine d'années environ, je vagabonde, et retourne fréquemment en ces lieux, retrouvé une personne bien précise, et à cette fin, je bifurquais soudainement dans une rue parallèle, me déplaçant avec aisance dans les ténèbres.
"Orwell ? Orwell ! C'est Kazuo ! Répond !"
J'étais dans une ruelle sombre, derrière l'entrepôt désaffecté où mon contact vivait. C'était un être nocturne, à l'allure reptilienne, que l'on nommait Erasha Serpent ; leur sang était glacé, et peu appréciait leur compagnie. Pourtant, Orwell avait un certain charme animal, son visage serpentin recouvert d'écailles noirâtre comme le reste de son corps, lui donnait une étrange beauté prédatrice, tout comme sa voix râpeuse qui me faisait hérisser les poils de la nuque, mais que je ne pouvais m'empêcher d'écouter.
"Tu repars bien vite, Kazuo..."
Je sursautais. Caché derrière une poubelle, l'on m'observait dans l'ombre... Son petit plaisir, me surprendre malgré toute mes précautions, et il était maître en matière de dissimulation, à défaut d'être doué pour les travaux physiques, il faisait marcher astucieusement son cerveau ; en témoigne le réseau d'informations très influent qu'il avait su mettre sur pied, sans bouger de sa cité. Et j'étais l'un de ses coursiers, le meilleur d'après ses dires. Ce petit travail m'assurait de bons revenus, et l'occasion de voyager avec un but, une destination, ainsi que des contacts un peu partout.
Mais pour l'heure, Orwell se dressait devant moi, emmitouflé qu'il était dans une robe noire à capuche, ne pouvait dissimulé l'éclat rougeoyant de ses iris, ni le sifflement de sa langue alors qu'il humait l'air ambiant. Un léger silence s'installa, car il me mettait toujours un peu mal à l'aise, avant que je ne me décrispe.
"Oui, oncle Iky est pénible quand il s'y met, et je préfère largement voir du pays. Où allez-vous m'emmener cette fois-ci ?"
"J'ai un ami, dans le royaume de Carlsberg, qui attend quelques nouvelles de ma part. Tu pars sans plus tarder."
"Et où habite-t-il ?"
"Tu le trouveras dans le bourg de Kronen, la capitale. Il te suffit de suivre la route de l'est. Maintenant file mon ami !"
Je ne me le fis pas dire deux fois. Il me tendit une lettre que je fourrai dans mon sac, et m'en retournai chez mon oncle, prendre une bonne nuit de sommeil avant de répondre à l'appel de la route.

~¤~

L'air était lourd, saturé de poussière, et Jiorg avait une respiration lente et difficile. Depuis combien de temps était-il enfermé ici, dans cette geôle humide ? Il avait depuis longtemps perdu cette notion, attaché au mur par une lourde chaîne. Avant il avait été un jeune homme plein d'ambition, qui venait de s'établir comme forgeron. Maintenant, il ne restait plus rien de lui, juste un corps famélique et un esprit pourrissant dans l'obscurité. Jiorg luttait pour garder ses souvenirs, et un peu espoir, mais ce n'était qu'une mince lueur qui tremblotait dans l'obscurité. Il n'avait plus que son nom, que le geôlier prononçait pour le réveiller et servir les restes qui lui serviraient de repas.

Cependant... quelque chose changea soudainement dans la lancinante monotonie dévorante de ces lieux. Les torches du couloir n'éclairaient que très peu et laissaient l'obscurité régner en maître, mais une source de lumière bien plus forte vint chasser la noirceur, et il put entendre les cris de ses semblables, dont les yeux étaient blessés par l'éclat étranger. Lui-même fut aveuglé, et ne vit pas le visage des hommes qui le libérèrent de ses fers, avant de le soulever et le traîner hors de sa sordide cellule. Jiorg se laissa faire, il n'avait pas la force de lutter. Ses tortionnaires parlèrent, et eurent quelques rires, mais cela échappait à sa compréhension. Plus aucune volonté ne l'animait, il n'était qu'une coquille vide, une carcasse dépourvue de substance...


Rédigé par Maitre Renard

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